I - HISTORIQUE ET OBJECTIFS
Les Magistères ont été crées en 1985 à l'instigation de J.P CHEVENEMENT, alors Ministre de l'Education Nationale, afin de permettre aux universités d'offrir des formations professionnalisantes de haut niveau utilisant les compétences uniques disponibles dans les structures universitaires :
"...Afin de mieux articuler l'Université avec le marché du travail par les formations qu'elle assure, j'ai pour ambition d'encourager les meilleures filières des Universités de façon spécifique, qu'il s'agisse des formations dont le secteur productif s'arrache les diplômés ou que ce soit des formations d'excellence dans des disciplines de base préparant de façon optimale aux études doctorales.
On reconnaît généralement aux universités, dans tous les pays développés, un mérite spécifique et très important pour la valeur de l'enseignement supérieur : celui de donner aux étudiants une formation intellectuelle de haut niveau, ce qu'on appelle la formation à et par la Recherche. Cette formation n'est pas destinée à préparer aux métiers de la Recherche mais à l'ensemble des professions car il s'agit avant tout d'une formation de l'esprit, la meilleure de toute. Cet avantage incontesté, j'ai décidé de le valoriser et de l'utiliser mieux encore.
C'est pourquoi, j'ai demandé à Monsieur PAYAN et à son équipe de la Direction Générale
d'organiser dès la rentrée 1985 la mise en oeuvre de filières de trois ans commençant à BAC +2. Elles porteront le nom de "Magistères". "
J.P CHEVENEMENT. Ministre de l'Education Nationale (Discours du 18 Février 1985)
"... Il paraît souhaitable d'encourager l'organisation de formations universitaires en trois années après le premier cycle pour répondre au souhait d'étudiants très motivés, ayant déjà montré leur aptitude à un effort intellectuel constant et désireux de recevoir des enseignements associant acquisitions fondamentales, connaissances scientifiques, applications professionnelles et initiation à la recherche. Les objectifs poursuivis par un tel projet visent à assurer une professionnalisation de haut niveau, une formation par la recherche ainsi qu'une multidisciplinarité équilibrée. Ces Formations prendront le nom de"Magistères". "
J.J. PAYANT, Directeur Général des Enseignements Supérieurs et de la Recherche
(Circulaire du 15 mars 1985 portant appel d'offres pour la constitution des Magistères).
Selon les termes de la circulaire citée ci-dessus et conformément aux pratiques administratives mises en oeuvre par le Ministère de l'Education Nationale, les Magistères doivent respecter les principes suivants :
contrôle préalable de la qualité du programme et
de sa conformité à l'esprit du nouveau diplôme
par la mise en oeuvre d'une procédure nationale
d'accréditation,
accès sélectif au niveau Bac + 2 ou plus, dans le
respect de " l'élitisme républicain",
promotions limitées autorisant l'instauration d'un
véritable tutorat,
durée d'études globale de trois années,
permettant la coexistence d'enseignements théoriques et
pratiques ainsi que de stages d'application et aboutissant à
un diplôme de niveau Bac +5,
très grande souplesse dans la conception et l'adaptation des
programmes et dans le projet pédagogique, incitant à
l'innovation,
finalité professionnelle fortement affirmée mais dans
une acceptation large, la profession pouvant être aussi bien le
métier d'enseignant ou de chercheur que l'activité
pratique du cadre de haut niveau,
formation à et par la Recherche, pour les Magistères
à vocation "fondamentale",
le responsable de chaque Magistère est l'interlocuteur unique
des instances de tutelle,
une Commission de Perfectionnement, présidée par une
personnalité extérieure et comprenant des
représentants des milieux économiques et des grands
organismes de recherche, des enseignants et des étudiants,
veille régulièrement à l'évolution du
Magistère et à son adaptation aux
débouchés possibles,
II - TRENTE HUIT ANS APRÈS
Dans ce cadre, de 1985 à 1988, 67 Magistères ont été créés. Environ une quarantaine sont encore en fonctionnement, les Ecoles Normales Supérieures ayant renoncé au titre de Magistère. Depuis la rentrée 1988, aucune nouvelle accréditation n'a été prononcée, cependant quelques magistères ont été créés comme Diplôme d'Université stricto sensu.
Alors que pour les Magistères créés en 1985, la 38 ème promotion d'étudiants a commencé ses études, que sont devenus les Magistères ?
Les enquêtes régulières de l'AGREMA confirment celle du COMITE NATIONAL D'EVALUATION et permettent un bilan global faisant apparaître trois tendances :
A
- Une insertion réussie dans le paysage
universitaire
Elle illustre les conséquences de la souplesse voulue par les promoteurs de la filière. Cette souplesse confère à beaucoup de Magistères un caractère évolutif, reflétant la possibilité d'expérimentations en matière de programmes et de pédagogie, conférant de ce fait une grande diversité à ces formations :
DIVERSITÉ DES ORIENTATIONS GÉNÉRALES
Les Magistères se positionnent selon un spectre allant des formations à caractère fondamental dont l'enseignement repose principalement sur la formation par la recherche et conduit fréquemment à la préparation d'un doctorat, aux formations à finalité professionnelle affirmée, avec une importante participation d'intervenants extérieurs visant, dès l'obtention du diplôme, à déboucher sur la vie active dans tous les secteurs professionnels.
DIVERSITÉ DES CHAMPS DISCIPLINAIRES
La formule de l'appel d'offres n'impliquait aucune exclusive disciplinaire, de sorte que les domaines les plus divers de la connaissance et de la formation ont pu marquer leur intérêt. Ainsi coexistent à la fois des Magistères monodisciplinaires et des Magistères pluridisciplinaires, comme l'atteste la liste des programmes accrédités. A noter que, si le secteur "lettres et langues" a relativement peu participé à ce nouveau diplôme, quand il l'a fait, il a ouvert aux "littéraires" de nouvelles filières professionnelles.
Quelle que soit la discipline, les Magistères adhèrent à un ensemble de principes communs :
une sélection intelligente, généralement sur
dossier, entretien et test ou, dans le cas de concours explicites, en
accordant un poids très important à un entretien final
destiné à apprécier la motivation des candidats
et les traits marquants de leur personnalité ;
une pédagogie active, fondée sur la réflexion et
la recherche, qui s'efforce de tirer le meilleur parti du tissu
universitaire aussi bien que des relations étroites avec les
milieux professionnels publics ou privés ;
des programmes conçus en vue de maintenir une activité
soutenue des étudiants sur 3 années, à la
différence de certaines écoles où - après
un concours difficile - les élèves se montrent moins
ardents lors de leur scolarité ;
une ouverture vers les milieux professionnels, notamment sous forme
de stages souvent de longue durée, impliquant une mission
assignée au stagiaire et son suivi par un directeur
universitaire de stage selon une formule de type "tutorat"
;
la présence d'experts professionnels dans le cadre des
Commissions de Perfectionnement prévues par les textes. Ce
recours à des membres extérieurs pouvant
apprécier et conseiller les formations facilite
l'adéquation très souple des enseignements à
l'évolution des réalités professionnelles ;
des promotions à effectifs limités, avec cependant la
volonté, chaque fois que le permettent les contraintes
(locaux, corps enseignant, moyens de financement), de tendre vers les
plafonds quantitatifs prévus par les textes, soit un à
deux groupes de 35 à 40 étudiants chacun. Actuellement,
toutes disciplines confondues, l'effectif moyen par promotion
annuelle est de 28 (enquête de l'AGREMA de 2014).
En dépit de la brièveté de l'expérience des Magistères, les différents constats permettent d'affirmer que leur création a constitué pour l'Université un facteur important d'innovation et de dynamisme :
augmentation parfois importante du nombre des candidats au
recrutement. De ce fait la qualité des étudiants
retenus a permis d'atteindre des taux importants de succès au
diplôme de Magistère, mais également aux
diplômes nationaux de Licence et Master. Paradoxalement, quand
on relève un certain "taux d'évaporation" (cas de
certains Magistères scientifiques), celui-ci est signe de
succès car il correspond au départ en fin de 2e
année d'étudiants vers les Grandes Ecoles scientifiques
ou commerciales consacrées ;
création d'enseignements nouveaux correspondant au souci de
faire des Magistères des formations de haut niveau
destinées à pourvoir des emplois d'encadrement dans des
secteurs encore mal desservis par les filières universitaires
traditionnelles (circulaire J.J. PAYAN du 15 Mars 1985) ;
bénéfices pour l'ensemble des étudiants : la
position des Magistères au sein des universités permet
la diffusion des innovations pédagogiques et l'utilisation de
leurs équipements au bénéfice de tous
;
une très large ouverture internationale favorisée par un suivi pédagogique sur 3 années, permettant en particulier l'année complète de Magistère 2 à l'étranger ;
contribution forte à donner à l'université une
crédibilité et une considération
professionnelles, notamment auprès des grandes entreprises, ce
qui s'est traduit par un taux d'insertion professionnelle très
élevé ;
contribution, pour un grand nombre de Magistères, surtout
scientifiques, à l'accroissement du nombre d'étudiants
en thèse de doctorat. Ces Magistères, comparés
aux Ecoles d'lngénieurs, se signalent par le taux
élevé de poursuite d'études doctorales
;
accessibilité de filières d'excellence à des
étudiants qui ne pourraient supporter les frais de
scolarité de certaines Ecoles.
III - LE DEVENIR DES MAGISTERES
Les Magistères s'insèrent particulièrement bien dans les nouvelles structures de l'enseignement universitaire Licence - Master - Doctorat. En effet cursus professionnalisants à Bac+5, comparables à celui des écoles d'ingénieurs ou de commerce, les Magistères recrutent dans les L2 et dans les Classes Préparatoires aux Grandes Ecoles et incluent dans leurs cursus les diplômes de Licence et de Master. De plus la poursuite en doctorat d'un nombre important d'étudiants de Magistère confère à ce diplôme une extension naturelle pour une sortie diplômante à Bac+8.
A ce jour plus de 30 000 étudiants ont été diplômés
CONCLUSIONS
Les Magistères constituent une chance pour l'Université.
Ils offrent aux étudiants une formation de haut niveau bénéficiant de toutes les potentialités humaines et matérielles des Universités françaises et leurs ouvrent de ce fait de nombreux débouchés.
Leur qualité a été reconnue par le rapport de G.AUBERT et par
le Comité National d'Evaluation:
"Le Comité encourage le maintien et la poursuite des magistères, diplômes de qualité qui ont fait leurs preuves" ( Rapport du CNE-1994) .
De par leur originalité, leur exigence de qualité et les débouchés qu'ils assurent à leurs étudiants, les Magistères constituent sans conteste une chance pour les étudiants et pour l'Université, mais également pour les entreprises et les organisations du monde économique et social qui peuvent ainsi recruter des jeunes cadres formés, compétents et performants.